Attendons la suite … Il en aura fallu du temps pour que se tienne la 1ère réunion (pas la dernière j’espère) portant le somptueux label « Etats Généraux de la Sécurité Routière en Région wallonne » à l’initiative de celle-ci. C’est pas beau ça ? Et c’est vrai que des associations telles que le GAR, PEVR, RED, NDSR, APPER et d’autres peut-être, se décourageaient quelque peu (que cette expression est faible) de voir émerger des cartons cette idée quasi désuète, surtout en regard de ce qu’il se pratique déjà – et depuis belle lurette ! - en la matière de l’autre côté de la « barrière de chicons ». C’est le 24 septembre dernier, à Namur, que s’est déroulée cette journée au cours de laquelle différents intervenants eurent l’occasion de s’exprimer.
Les quelques Ministres présents (Antoine, Courard et Daerden), pourtant conscients du retard pris par la Wallonie au niveau des victimes de la route, ont tenu à relativiser le problème : il est vrai que l’on fait dire aux chiffres ce que l’on veut bien et lorsque le 1er dit « Pour ma part, je me limiterai à relever que le nombre d’accidents avec lésions corporelles témoigne d’une situation qui reste bien plus préoccupante en Flandre puisqu’on y comptait 31423 accidents et 41830 victimes en 2005, pour 13922 accidents et 19550 victimes en Wallonie», je pense – comme beaucoup d’autres - qu’il se plante dans les grandes largeurs et ce n’est pas certain que ce soit totalement innocent. C’est quelque peu « léger », et même malhonnête, de s’en tenir à ces valeurs parce que d’une part, elles induisent le citoyen en erreur et que, d’autre part, le vrai problème de la sécurité routière – en Wallonie en particulier- ne se situe pas là. Pour sa part, l’Administrateur délégué de l’Institut Belge pour la Sécurité Routière (IBSR, M. Patrick Derweduwen) eut tôt fait de remettre les pendules à l’heure en s’appuyant sur des chiffres et des graphiques établis sur base de données réelles et qui ne souffrent, quant à eux, aucune contestation. Dans son analyse de la sécurité routière en Belgique, il dira entre autres : « Au niveau national, nous constatons qu’en 2000, la Wallonie était plus performante que la Flandre. Mais cette dernière a mis en place une politique plus volontariste et a connu une évolution plus favorable de la sécurité routière. Elle compte à présent moins de décédés 30 jours fin de mois par milliard de voyageurs/kilomètre ». Soit dit en passant, on notera que les chiffres les plus récents de l’IBSR sont toujours « en retard » de 2 ans : ils s’arrêtent donc à 2005 et c’est seulement en consultant l’Institut National des Statistiques (INS, site « statbel ») que l’on trouve des valeurs plus récentes (2006). Ceci ne change d’ailleurs fondamentalement ni les valeurs, ni les conclusions.
Le public présent a beaucoup apprécié, à juste titre, l’exposé vitriolé de M. Francis Herbert, Secrétaire général de PEVR (asbl Parents d’Enfants Victimes de la Route), qui s’est montré particulièrement incisif, voire véhément, pour dénoncer la passivité de la Région Wallonne en regard de la promptitude et du volontarisme des Flamands face à la problématique de la sécurité routière. Peu enclin à la langue de bois, il dira notamment : « Depuis 10 ans, au nord du pays, responsables et médias assènent un même message : il est admissible que le comportement de certains conducteurs entraîne la mort d’autant de jeunes. Ce message est rappelé chaque jour dans les médias flamands, beaucoup moins du côté francophone … En Flandre, un consensus s’est fait à l’idée qu’il faut plus de contrôles pour plus de sécurité ». Et, à propos des parents francophones de victimes, d’ajouter : « Nous avons lancé un appel aux deux communautés pour qu’elles agissent en leur faveur. La Flandre a immédiatement répondu à cet appel en organisant des Etats Généraux sur le sujet. On attend toujours une réaction de la Communauté française ».
Une autre exemple, choisi au hasard de l’inventaire, illustre assez bien cette situation pour le moins inquiétante ou consternante (c’est selon) : voici quelques années, les Flamands se sont dits que le nombre de blessés et de tués sur leurs routes était trop élevé, alors qu’ils disposaient des moyens financiers pour une meilleure politique de prévention, sans oublier l’aménagement et l’entretien des routes. Et ils ont rapidement fait en sorte que cela change, en gardant présent à l’esprit que la peur du gendarme était un facteur essentiel en faveur d’un changement de comportement au volant. Une illustration ? Certaines routes du nord du pays sont truffées de radars fixes et parfois, les boîtiers sont … vides, ce qui leur permet d’atteindre le rôle dissuasif qu’ils sont censés tenir. A cet égard, on notera que l’IBSR, faisant état des pratiques européennes, précise que le conducteur « normal » est susceptible de modifier son attitude sur la route s’il sait qu’il court un risque sur quatre de se faire verbaliser (excès de vitesse, alcool, …).
Mais énumérer les personnes qui ont pris la parole, ainsi que des arguments qu’elles ont développés, serait fastidieux pour moi, mais surtout long et inutile pour vous : en bref, on a beaucoup parlé pour formuler, en résumé, que les Flamands étaient bigrement en avance sur les Wallons en matière de sécurité routière (prévention, répression, entretien des voiries, …). Partant, c’est chez nous que l’on déplore le plus d’accidents et de victimes. C’est indéniable, point. Quoiqu’il en soit, dans ce cas d’espèce, « nous n’estons nin fir d’esse wallons ».
A nos yeux cependant, si l’on souhaite voir décroître de façon drastique le nombre de victimes de la route (car finalement, tel est bien le but ultime), il convient de « mettre le paquet » et que la Wallonie (les autorités concernées donc) se réveille enfin. Alors, s’il est certain que des journées comme celle-ci sont intéressantes à bien des égards, il demeure que nos associations attendent avec impatience la suite que l’on va lui réserver. Nous n’attendons pas du tout un « copier-coller » de la précédente : en effet, dans un délai … raisonnable (mais qu’est-ce que cela veut dire chez nous ?), des éléments concrets doivent être dégagés (prévention accrue, augmentation du personnel de Police, renforcement des contrôles, plus grande sévérité envers les contrevenants, chasse à la délinquance routière et aux récidivistes, …). Eux seuls sont de nature à amoindrir enfin ce nombre de victimes.
C’est cela que nous réclamons depuis (trop ?) longtemps, et non des discours. Apparemment, la bonne volonté y est mais elle ne sera jamais suffisante pour mener à bien une si difficile mission. Croisons les doigts, restons optimistes et faisons confiance … une fois encore. Mais au fait, j’y pense : pourquoi ne demanderait-on pas à Yves Leterme de placer ce sujet à l’ordre du jour ? Une nouvelle pomme de discorde ? Mais non …
Albert GILLIQUET, Vice-président